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Vivre ensemble dans l'open space - Page 206

  • Caffè Kimbo

    Aujourd'hui je ne suis pas foncièrement gaie. Je m'arrête dans un café qui porte sur la vitrine la mention "Caffè Kimbo, il vero caffè di Napoli". Je me dis que ma journée va se trouver grandement améliorée si je bois un bon café. L'endroit est propre, tenu par deux dames typiques du quartier, sombre et frais.

    Rien qu'à la façon dont elle fait fonctionner sa machine les larmes me montent aux yeux. Au lieu de l'expresso que je comptais avoir, elle me sert une espèce de bouillon allongé, qui a bon goût mais sans aucun corps. Voilà ce que je ne m'explique pas à Paris, avec la machine italienne et le café italien, servir un immonde jus de chaussette.

    Au moins une raison objective d'être triste.

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  • bla bla

    Je ne sais pas pourquoi avant-hier je suis allée au séminaire annuel de mon entreprise. Ils les organisent toujours le vendredi parce que les administratifs ont négocié leurs 35 heures de telle façon à avoir leur vendredi de libre. Pour tous les autres qui travaillent sur planning ce coup du vendredi libre n'a aucun sens. Donc il serait mal séant de prendre un jour de congé et de se faire remplacer afin d'aller au séminaire. Ne vont donc au séminaire que les chefs et les assistants qui ont trimé pour fabriquer les powerpoints rédigés par leur chef. Éventuellement quelqu'un en travail posté s'y pointe après sa pige s'il a la chance de travailler le matin. Du coup moi je n'y étais jamais allée. Là j'y vais car je n'étais pas planifiée. Le lendemain, je me demande si ça valait la peine d'avoir gaché un jour de repos pour ça...

    Donc, les séminaires, ça veut dire que l'on booke la salle de conférence d'un hôtel 5 étoiles, pas trop loin du bureau, dans notre cas ce fut Neuilly, et on s'auto-congratule en présence de ses collègues pendant une journée entière. Comme je travaille dans une télé, certains avaient fabriqué des petits montages pas si mal faits que ça et même de vrais petits films pour mettre en scène le problème de la mauvaise utilisation du logiciel qui sert à faire le trafic chaîne et qui est surchargé. C'était marrant.

    Le clou de la journée fut le dévoilement d'un IPAD que tout le monde a pu toucher. Les perspectives de ce nouveau support ont été évoquées sur un ton lyrique par les personnes travaillant à l'interactivité. Le responsable des antennes, seule note discordante au milieu de ce choeur d'enthousiastes béats, a rapellé que la très grande majorité de nos spectateurs continue et continuerait à regarder la télé sur un poste ordinaire, et même pas à écran plat j'avais envie d'ajouter. C'est ce qu'on appelle du linéaire...

    Le leitmotiv : nous sommes magnifiques, nous avons gagné tant de part d'audience dans ces pays grâce au sous-titrage, grâce à l'offre de nos programmes qui est de qualité, bravo !

    Le deuxième leitmotiv : c'est simple à faire, tout le monde peut le faire et ça ne coûte rien.

    Le troisième leitmotiv : notre émission nous sommes 2 pour la faire, notre programme, nous sommes 3 et 1 quart à le faire, notre service n'est composé que de 4 personnes et nous parvenons à faire tout ça : wonderman ! Est-ce une façon subtile, pas tant que ça, de faire passer le message : de grâce, embauchez !?

    Grattez les paillettes et vous verrez la paille, mais surtout, le jour du séminaire, elle est très bien cachée la paille.

    Un heure pour parler de la VOD. Génial me dis-je. Effectivement, valorisons notre catalogue, démarquons-nous d'Orange (j'ai une orange box) qui propose des films en VOD dans un fouilli tel qu'il vous décourage d'y chercher quoi que ce soit. Et là j'ai pensé que la télé a besoin de bons films sinon personne ne fera de la VOD et que donc il faut absolument continuer à produire des films sinon ça ne marchera pas. Et que si ça continue comme ça, on n'aura que des films  pourris à proposer en VOD. (c'est déjà le cas...) Je me demande, déjà certains films ne marchent pas en salle, auront-ils une troisième chance en VOD, la deuxième étant le DVD ?

    A la pause déjeuner, nous sommes dirigés vers une salle donnant sur un jardin intérieur. Tous ouvrent les portes coupe-feu et se ruent assiette et verre à la main sur les pelouses. Le charmant apprenti maître d'hôtel est totalement débordé par cette horde gauloise et n'y peut rien. D'une main ferme il va quand même récupérer les bouteilles de vin et les bouteilles d'eau posées en équilibre précaire dans l'herbe en expliquant à chacun qu'on ne peut pas mettre de bouteilles dehors et que le jardin n'est pas libre d'accès en théorie.

    Je constate un léger malaise. Je vais le voir. Il me confirme que normalement le jardin n'est pas accessible et n'est pas censé se transformer en aire à pique nique, mais bon, il a bien vu que ce ne serait pas possible de stopper tout ce monde. Il craint juste d'avoir un peu de mal à récupérer les fourchettes égarées dans l'herbe. Tout ça dit très simplement avec juste un léger ton très pince sans rire, très école hôtelière de Genève. J'ai bien aimé.

    J'ai fait ma cheftaine de jeannette et ai prié mes collègues de bien ramasser leurs assiettes et leurs serviettes en papier.

    Le soir, un coktail et une fête clôturaient ces travaux épuisants. Le traiteur n'avait pas encore préparé les petits fours et les canapés. Autant dire que quand les gens invités ont commencé à boire du champagne vers 20h30, il n'y avait rien à se mettre sous la dent, que des chips de betterave et quelques bretzels. Au bout d'une heure, certains sont déjà bien éméchés et ne se rendent pas bien compte de ce qu'ils disent.

    Au niveau moins 1, un bar karaoké accueuillait le personnel qui avait envie de s'époumonner sur des classiques de la variéte française ou étrangère. Généralement il est envahi par une horde d'assistantes, à l'exception d'une journaliste camerounaise ultra sympatique, et toutes se défoulent sur des tubes tels que "Elle a les yeux révolver", "Laissez-moi danser" etc. Le volume sonore est indescriptible. Ca prouve qu'on a besoin de se défouler. "I will survive" déchaîne les foules. Le petit manipule féminin et à majorité black est rejoint par quelques hommes sympatiques : mon collègue chargé de prod. qui joue de la batterie dans un groupe, un des piliers du service com qui révèle une totale absence de self-consciousness en se lançant dans des hurlements incroyables. Bref, j'ai mal à la gorge, je suis épuisée. Il est onze heures. Je décide que je peux rentrer chez moi. Faute de canapés "ethiques et chics", j'ai eu une banane offerte gracieusement par la dame qui faisait des smoothies. Ca cale.


    parcy_phototour61.jpgLe patio qui donne une idée du non-style de ces chaines d'hôtels internationaux où quelque soit l'endroit du monde où l'on se trouve ils seront toujours identiques.parcy_phototour77.jpg

     

     

     

     

     

    Et ci-contre, la salle à manger avec le jardin où nous avons picniqué au grand dam du maître d'hôtel.

  • La dispersion c'est l'hypertexte de l'esprit.

    Il y a quelques semaines je déplorais le fait qu'internet ne faisait qu'aggraver une de mes tendances chronophages: la dispersion, ce qui me mène également à la distraction.

    Au fait, en lisant le Libération spécialement édité par Karl Lagerfeld je découvre que Monsieur Karl fait 15 choses à la fois, au fait, je cite Libé, il est "hypertexte".

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    Bon, je ne voudrais pas être prétentieuse, voire, übernarcissique, mais je peux dire la même chose : je suis, moi aussi, très "hypertexte".

     

    "Il y a des  moments aussi où les lieux sont traversés par des gens en bleu de chauffe, les mains calleuses, qui réparent on ne sait quoi et déparent dans ce qu'on imagine du quartier général d'un tel homme. Il y a surtout, sans arrêt, cet esprit "hypertexte" de Lagerfeld, encyclopédiste à la Diderot qui pratique la digression, la parenthèse, l'anecdote, de manière totalement compulsive, ce qui donne une conversation aussi décousue qu'emballante." Françoise Marie Santucci - Libération 22 juin 2010


    Je passe sur les "gens" en bleu de chauffe qui déparent rue de Lille... Par contre F.M Santucci se trompe quand elle dit que Freja, une icône Chanel (et égérie d'Isabel Marant) est brésilienne. Elle est danoise. Et oui, les danoises brunes ça existe.

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