J'achète mes produits de vie quotidienne en ayant en tête différents critères. Le premier est le prix bien sûr, ensuite la qualité. Mais l'esthétique, la forme de l'emballage, sa couleur, comptent pour beaucoup. N'oublions pas le spot publicitaire. Si la publicité est nulle ou véhicule des valeurs qui me sont opposées, je n'achèterai pas le produit.
Dans le cas du liquide vaisselle, j'essaye aussi de m'amuser un peu. La couleur doit être jolie, et le parfum agréable. Donc, je n'achète pas le liquide vaisselle Leader price au muguet car le vert "hulk" du flacon jure avec l'ensemble des accessoires de ma cuisine. Pour la même raison, je n'achète pas la ligne "Fructis" de Garnier, le vert fluo des flacons est à hurler avec les carreaux immondes de ma salle de bain, d'un jaune moutarde tirant vers le miel (si on veut).
Donc, je me laisse séduire par ce liquide vaisselle, qui plus est l'association "guarana fruits rouges", totalement fantaisiste me fait plus penser à du gel douche qu'à un liquide vaisselle. D'ailleurs, le gel douche au guarana existe.
Les voici tous les deux :
Comment me donner de l'énerge pour faire une tâche que j'aborre par sa répétivité, la vaisselle, et comment me donner un coup de fouet le matin grâce au léger parfum de coca cola et de bergamote du gel douche body shop.
Grâce au guarana, je peux affronter la tristesse du quotidien. En effet en ce moment les choses qui me sont les plus pénibles sont les tâches domestiques et me lever le matin.
Je ne savais pas ce qu'était le guarana avant de lire le journal d'Edgar Morin "Pleurer, aimer, rire, comprendre" publié chez Arléa en 1996. Dans son journal, au milieu de reflexion profondes sur la vie en général, j'apprend aussi qu'il habite du côté de la rue des Arquebusiers dans le 3ème arondissement, qu'il va s'acheter de temps en temps du tarama chez le traiteur grec du Bld Beaumarchais (Les Cyclades) et les fameuses gélules de guarana dont il croit aux vertus énergisantes, rue de Charenton, chez Guarapi international. En lisant cela, je me suis persuadée qu'un jour je le croiserai forcément. En effet, à l'époque je travaillais rue des Tournelles, parfois il m'arrivait d'acheter quelque chose chez son traiteur grec, et j'habite toujours pas loin de la rue de Charenton. Or je ne l'ai croisé qu'une seule fois, douze ans plus tard, complètement par hasard, rue St Claude. Il avait un téléphone portable à l'oreille et je n'ai donc pas osé le saluer.
D'un seul coup, dans l'ennui et la lourdeur - parfois - de ma vie de tous les jours, je fais souffler un vent d'Amazonie et d'intelligence sociologique et tout ça, grâce au liquide vaisselle!
Merci Franprix! Par un acte tout simple, faire des courses, je m'associe à un grand penseur contemporain qui explique dans ses ouvrages que la simplicité est complexe. Je passe de ma cuisine, de la morosité de ma vie de tous les jours à la forêt amazonienne. Je comprends finalement qu'acheter du liquide vaisselle est un acte complexe, qui exerce ma créativité et mon imagination. Plus que la réalité même du guarana - contenu ou pas dans le liquide vaisselle et dans mon gel douche - c'est l'idée même du coup de fouet qu'il est censé me donner qui va transformer la dureté de mon quotidien en un monde enchanté à la portée de tout un chacun.